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Le Web 3, nouvel eldorado ou mythe marketing ?

On aurait pu vous parler de piratage en Ukraine, de pirates russes et de cyber attaques en Ukraine, voire de « cyber guerre » comme disent les experts des plateaux télé, mais on se mange tous et toutes assez d’info anxiogènes en ce moment alors on s’est dit que c’était pas la peine d’en rajouter une couche. On a plutôt pris le parti de vous parler du sujet tech le plus malhonnête du moment : le web3.

Comme en chacun de vous sommeille un Sherlock Holmes, vous vous doutez déjà que s’il y a un web3, c’est qu’il y a un web1 et un web2. Bien joué !

Le web1.0 est l’Internet jusqu’au début des années 2000, un peu désorganisé, avec des pages statiques, que tout le monde était censé pouvoir héberger chez soi . Le web2.0 apparaît ensuite : il est interactif et participatif, c’est celui des blogs, des réseaux sociaux et de Wikipédia, celui où tous les internautes sont acteurs en créant, partageant, commentant. Le web2, c’est aussi celui où les géants de la silicon vallée, les Google, Apple, & Co ont commencé à émerger. Les services en ligne deviennent centralisées, contrôlés par quelques entreprises, à l’inverse de la promesse originelle des débuts du web où chacun était censé pouvoir publier son site sur son ordinateur personnel. Avec cette hyper-centralisation du web sont apparus les modèles économiques basés sur l’exploitation des données personnelles.

Le terme web3 est apparu en 2014 dans les mots de Gavin Wood, cofondateur de Polkadot et Ethereum, deux services reposant sur la technologie blockchain. Le web3 reste relativement ignoré pendant quelques années et c’est en 2021 qu’il est exhumé de son relatif anonymat pour être brandi à tour de bras par les évangélistes de la tech qui nous vendent un futur meilleur et des lendemains qui chantent à grand coup de blockchain, de NFT et de cryptomonnaies. Le web3 est censé remédier à l’hyper-centralisation des grandes plates formes du web2.0 et renouer avec l’utopie du web1.0, à savoir un web décentralisé, sans autorité centrale, accessible à tous et toutes et respectueux de nos données personnelles. En effet, la blockchain ou en bon français chaîne de blocs, sorte de base de données distribuée et immuable, sera le garant de la décentralisation du web3, et l’utilisation des crypto monnaies et des NFT est censée ouvrir la voie à un modèle plus vertueux pour assurer la pérennité économique de ce web3. Ainsi, l’utilisation des technologies composant le web3, décentralisées par nature, sera censée supprimer les intermédiaires, soit les grandes entreprises et redonner le pouvoir aux utilisateurs finaux.

Voilà pour la théorie. Sauf que le web3, c’est un peu comme l’Inde pour les voyageurs, ou la crème fraîche dans les pâtes carbonara pour les gastronomes en herbe : ça divise.

Ses partisans assurent qu’il va rendre le pouvoir aux utilisateurs et que stocker les données dans des chaînes de blocs est le meilleur garant de l’indépendance des services qui vont y émerger. Plus de censure non plus puisque la blockchain est invulnérable et à l’abri de la main mise de n’importe quel État, gouvernement ou multinationale. Certains services et organisations basés sur des blockchains et leurs dérivés tels que les smart contract – les organisations décentralisées autonomes (ou DAO) pour ne pas les nommer – refléteraient déjà les vertueuses caractéristiques de ces technologies jusque dans leur gouvernance.

Ses détracteurs assurent au contraire que le web3 n’est qu’une vaste fumisterie. La décentralisation n’est qu’un leurre puisque les chaînes de blocs exigent tellement de ressources pour fonctionner que jamais votre smartphone ou ordinateur n’hébergera la moindre parcelle d’entre elles. Si elles sont bel et bien soutenues par une architecture distribuée, seules quelques sociétés aux reins solides sont en capacité d’héberger ces chaînes de blocs. Face au modèle publicitaire du web2 et à ses conséquences délétères, les cryptomonnaies et les NFT censés assurer l’indépendance économique des services du web3 ne résistent pas aux critiques non plus : les cryptomonnaies ont pris un sacré coup dans l’aile avec leur dévissage en mai (jusqu’à perdre 100% de leur valeur pour le Luna). Quant aux NFT, ces jetons de propriété censés renouveler l’économie du web, ils ne seraient aux yeux de la loi qu’une vaste fumisterie.

Alors, le web3, nouvel eldorado ou mythe marketing ? On vous laisse décider avec les ressources ci-dessous. Nous chez Noting2Hide on a opté depuis longtemps pour le web0.

À lire sur le sujet

A venir chez Nothing2Hide

  • Lundi 19 septembre on sera au cinéma Les 7 Parnassiens à Paris pour animer le débat qui suivra la projection du film de Clara Lopez Rubio et Juan Pancorbo Hacking Justice. On va parler de Julian Assange et de la Maison deslancceurs d’alerte, l’association dont nous sommes membre et qui dédie son action à la protection des lanceurs d’alerte.
  • On est très heureux d’inaugurer notre cycle autour de l’éducation aux médias et à l’information avec un premier atelier le 28 septembre à 16h à la médiathèque Aimé Césaire à Paris dans le 14e arrondissement : Comment repérer les pièges à clics ? Pour vous inscrire, contactez directement bibliotheque.aime-cesaire@paris.fr.
    La 3 va vous étonner !
  • On continue dans l’éducation aux médias et à l’information : le 12 octobre Nothing2Hide animera un atelier auprès de l’association Clichés urbains. L’objectif est de donner toutes les clés et les ressources à d’autres structures pour qu’elle puissent animer des ateliers à l’EMI en toute autonomie. Si vous ou votre association êtes intéressés, contactez-nous. On reparlera très bientôt et bien plus longuement d’EMI dans cette newsletter puisque l’année 2023 sera pour N2H l’année de la lutte contre la désinformation.
  • On organise une formation ouverte à la sécurité numérique. Elle aura lieu le 15 octobre de 10h à 13h. On vous communiquera le lieu dès qu’on aura la confirmation de la salle. Au programme : les malwares, les différentes familles, comment les identifier et comment s’en prémunir. Avec Thomas Bailleux, expert en cyber sécurité. Pour s’inscrire, c’est ici et si vous n’êtes pas déjà membre de l’asso, rien n’est perdu, rejoignez-nous !
  • Entre fin septembre et début octobre on va planter notre tente à Tours pour animer six jours de formation à la la sécurité numérique pour les futur·es journalistes de l’EPJT les 22, 23, 29, 30 septembre et les 6 et 7 octobre. Si vous êtes sur place, faites-nous signe !
  • On travaille avec Free Press Unlimited à l’adaptation et la traduction de deux nouveaux cours en ligne : comment protéger son identité en ligne et protéger ses périphériques, pour l’instant disponibles uniquement en anglais et très bientôt en français.
  • On sera en DiscoTech toute la semaine prochaine pour participer au forum sur la cybersécurité du même nom organisé par nos partenaires au Kirghizistan (l’événement s’intitule vraiment DiscoTech, on apprécie le jeu de mots 🙂
    disco

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